Dès leur venue, les jeunes salariées bénéficient d'une formation de deux semaines, puis, d'un suivi intense les premiers jours. Toutefois, en réponse à leurs interrogations, et dans l'intérêt de combler les lacunes existantes, des photos et vidéos sont mises à leur disposition. Ce mode de fonctionnement vient renforcer leur formation continue, ainsi que leur autonomie.
I- Des vidéos et photos : une aide au-delà des mots
Comme chacun le sait, les jeunes femmes employées à Solenciel sont en pleine reconstruction. Elles doivent tout reprendre depuis le début : formation, recherche de logement, mise à jour de leurs documents administratifs, vie de famille, sans compter l'apprentissage de la langue et de la culture occidentale. Leur travail à temps partiel étant particulièrement physique, un aménagement vient les soulager le plus possible. Somme toute, elles ont accès à des fichiers, conjointement aux ménages à accomplir. Ces fiches de poste comportent des indications précises, enrichies de photos et vidéos.
Nous pouvons citer la délicate formulation de Confucius : "une image vaut mille mots." C'est-à-dire qu'un visuel peut se révéler possiblement parfois plus puissant et concret que le serait un imposant paragraphe détaillé. En revanche, tout abus est mauvais. Il est primordial d'inciter au fonctionnement de sa capacité d'analyse. De la sorte, l'initiation au regard critique s'instruit sans réserve. Les mises en situation, les schémas, les montages vidéos, ou même, des auto-corrections, participent à cette appropriation des connaissances. Les cleaners sont, à fortiori, au cœur de l'action qui les fera "grandir".
Cette pédagogie particulière s'impulse par cette volonté d'indépendance des cleaners dans l'exécution des tâches. La prise de décision, la sollicitation de l'équipe encadrante en cas de besoin, ou même, l'affrontement de ses craintes et limites, prennent part aux attentes. Sans appel, la formation encourage à un réel dépassement de soi. De la sorte, elles adoptent une parfaite adaptabilité en travaillant leurs forces et leurs faiblesses. Toutefois, leur accompagnement requiert souvent un appui social et psychologique.
II- Une formation pour apprendre à travailler
Le lieu exact, la clef, l'étage, l'emplacement des conteneurs, ou encore, la présence d'une arrivée d'eau, les employées ont connaissance de ces informations bien en avance. Tout comme pour le nettoyage journalier, hebdomadaire, mensuel, et annuel. Une liste chronologique ordonne les renseignements, avec des descriptifs précis, de sorte à éviter toute perte de temps. D'ailleurs, avant de débuter un travail sur un secteur inconnu, chaque cleaner est en mesure de visiter virtuellement les locaux, via une vidéo montage.
Solenciel se veut comme une plate-forme d'insertion pour ces victimes. Pour y parvenir, leur formation professionnelle constitue un élément clef dans la réussite de ce projet. Effectivement, elle doit leur permettre d'accumuler de l'expérience, de l'autonomie, et du savoir-faire, tout en prenant de l'assurance. C'est par ce dispositif qu'elles pourront prétendre à d'autres emplois : dans la restauration, l'accueil client, ou la vente par exemple. Même pour les plus anciennes cleaners, il y'a toujours quelque chose de nouveau à retenir ou à redécouvrir. Le métier évolue, il y'a parfois des changements.
Les cleaners sont de jeunes nigérianes anglophones pour la plupart. Elles aspirent à une vie dite "ordinaire". Pourtant, leur rêve s'écroule à même pas 20 ans, lorsqu'elles sont embarquées de force dans la prostitution. A ce moment-là, elles n'ont plus le choix. Sans papiers et sans travail, elles ont une dette de plusieurs milliers d'euros à rembourser au réseau qui les exploite. Elles voudraient fuir, en vain. C'était sans compter sur le soutien inaliénable de Magdalena38, qui accorda tout son énergie à ces jeunes femmes.
III- Se vider l'esprit, se reconstruire, apprendre à vivre
Leur passé est incontestablement brisé. Concernant leur présent : les morceaux sont à recoller, repositionner, mais certaines pièces manquent. Pour l'avenir, elles doivent emprunter un autre chemin : celui de la guérison, et parfois, de l'oubli. Certes, ce qu'elles ont vécu ne quittera jamais leur mémoire. Toutefois, si elles parviennent à s'en détacher suffisamment sur le long terme, pour laisser cette période sombre de leur histoire de côté, c'est un large horizon de possibilités qui s'ouvre devant elles.
Les jeunes africaines, en dépit de leurs désastreuses mésaventures, demeurent profondément déterminées. En reprenant les propos d'Alex Mero : "L'espoir est la saveur d'un bonheur futur", on pourrait conclure sur le fait que ce désir de vie meilleure conforte les manques de leur présent. Combattantes comme jamais, ce métier se révèle, finalement, comme un excellent exutoire. Aussi bien pour le corps que pour l'esprit.